Victorine fin prête pour la promenade. Florence, sa propriétaire, accompagne toujours les promeneurs. Mais ce sont eux qui guident l’âne.
À Mosnay, Bouz’âne propose des promenades d’une heure trente à trois heures au pas de l’âne. Un petit « chemin de Stevenson » 100 % indrien.
Victorine n’a rien manifesté quand la patronne l’a « habillée » pour la promenade. Licol autour de la tête, bât en bois et sacoches de transport sur son dos recouvert au préalable d’une couverture, la voilà fin prête pour la randonnée. Mais passée la barrière de la maison, l’ânesse se montre plus réticente pour faire les premiers pas sur l’asphalte. Florence Roy s’en amuse. « Au départ, ils font tous ça. Ils testent… » Sans la brusquer, elle lui glisse à l’oreille quelques mots d’encouragement avec une petite tape amicale sur les fesses. « Les ânes n’aiment pas marcher sur le goudron. Ils s’en méfient, explique la propriétaire qui, avec son entreprise Bouz’âne, propose depuis quatre ans des randonnées au pas de l’âne autour de Mosnay. Heureusement, le parcours comporte très peu de routes bitumées. »
Pour éviter les situations de blocage, Florence accompagne systématiquement les randonneurs avec un deuxième animal. « Ainsi, aucun risque de grève pendant la balade : quand l’un ne veut plus avancer, l’autre prend le relais ! »
Gentils sociables mais parfois entêtésL’entêtement de l’âne n’est donc pas une légende ? « En fait, il est de nature prudente et émotive. C’est sa méfiance du danger qui peut le rendre entêté. Mais, contrairement aux idées reçues, il est aussi très intelligent. »
Bouz’âne met à disposition des randonneurs une dizaine d’ânes du Poitou (reconnaissables à leurs longs poils marrons) et de Provence (à la robe grise). Les premiers progressent à une vitesse de 5 km/h et sont donc proposés aux bons marcheurs ; les seconds sont parfaits pour les familles dont les enfants en bas âge peuvent même voyager sur leur dos ! Si tous ont leur caractère propre, ils ont en commun de savoir travailler avec du public. « La gentillesse et la sociabilité sont deux critères essentiels. Je privilégie aussi ceux qui sont les moins émotifs et les plus volontaires à la promenade. »
Victorine est de ceux-là. Passée « l’épreuve du bitume », elle finit par nous suivre d’un pas décidé. « Surtout, ne la laissez pas manger en chemin. Sinon, ça devient ingérable, prévient Florence qui invite à faire preuve de fermeté. Le travail, c’est le travail. Le casse-croûte, c’est pendant la pause. » Avant le départ, elle donne ainsi quelques conseils de base à tous les promeneurs : garder une bonne distance avec l’animal (ni trop loin, ce qui lui donnerait trop de force, ni trop près des sabots) ; ne pas le surprendre par l’arrière et rester à distance du « champ de tir » pour éviter les ruades ; et enfin ne jamais courir après si l’âne s’échappe. « Plus on va le poursuivre, plus il va s’enfuir. De toute façon, il finira toujours par revenir vers son congénère resté avec nous. »
Ces recommandations appliquées, la balade offre un charme particulier. Certes, le paysage n’est pas aussi vallonné et diversifié que le célèbre chemin de grande randonnée GR70 aussi appelé chemin de Stevenson, en référence au livre Voyage avec un âne dans les Cévennes, écrit par l’auteur écossais Robert Louis Stevenson. Mais la présence de l’âne donne un sens différent à la promenade où, inévitablement, une relation se noue avec l’animal. L’expérience, concentrée sur quelques heures, offre un bon aperçu de ce qui attend des voyageurs au long cours. « Je reçois des randonneurs qui se sont inscrits pour faire trois jours sur le GR de Stevenson. Ils viennent ici tester sur un petit parcours leur capacité à gérer un âne. Ainsi ils repartent rassurés. »
Bouz’âne, située aux Jadrets à Mosnay, propose plusieurs formules de randonnées accompagnées : découverte (de 30 mn à 1 h 30), pique-nique (2 à 3 h). Tarifs : à partir de 20 €. Sur réservation : tél. 06.74.73.48.26.
LaNR